Bourgogne, cyclotourisme, famille : P. MARIANI nous conte sa semaine estivale
Si Philippe Mariani nous a habitués à toutes les anecdotes de ses différents PARIS- BREST- PARIS, voici qu’il partage avec nous sa semaine de randonnée cyclo touristique familiale en Bourgogne. Les voies vertes ont été particulièrement appréciées cet été, en raison des conditions sanitaires en cours, mais pour lui c’est une coutume estivale et il a bien raison. Reste à savoir si vélo et dégustation font bon ménage !
GRAND HUIT BOURGUIGNON : Séjour itinérant en famille du 20 au 24 juillet 2020.
Dimanche 27 septembre 2020, une pluie drue tombe sur une nature qui en a bien besoin, le fond de l’air est frais, pour ne pas dire glacial, ce qui marque définitivement la fin de l’été et une entrée précipitée dans l’automne. Cette atmosphère morose aura eu raison de ma motivation. Aujourd’hui mon beau destrier restera au chaud, ma tenue de cycliste sur le cintre et mon esprit vagabonde et se souvient …
Depuis quelques années, durant la période estivale, nous avons pour habitude de consacrer une semaine de nos congés pour randonner à vélo en famille. Après la Bretagne et la Loire, nous mettons le cap sur la Bourgogne. Je mis donc à profit la longue période de confinement, durant laquelle nos activités vélocipédiques étaient en pause, pour réfléchir à notre futur périple. Après avoir recherché l’inspiration dans les roadbooks existants et des dizaines de clics de souris plus tard, le parcours voit enfin le jour sur l’écran. Au programme, 364 km en boucle, répartis sur 5 étapes, avec comme point de départ et d’arrivée la ville historique de Cluny.
Dimanche 20 juillet : CLUNY -> CHAGNY (70 Km)
Départ en douceur pour nos premiers tours de roues que nous effectuons sur la plus ancienne voie verte de France (1997), empruntant pour l’essentiel l’emprise d’une ancienne voie ferrée pour relier Mâcon à Chalon. Sur cette allée partiellement ombragée et asphaltée d’un bout à l’autre, notre tandem file à vive allure, suivi de près par les VAE (vélo assistance électrique) de nos anciens qui nous accompagnent chaque année dans nos aventures. Le patrimoine historique et culturel de la région est riche comme en témoigne le château de Cormatin qui mérite bien une halte pour découvrir tous les charmes de ce chef-d’œuvre du XVIIème siècle fréquenté par Lamartine qui aimait passer quelques agréables instants à la Pentecôte lorsqu’il venait gravirla Roche de Solutré. Nous abordons Saint-Gengoux-le-National par l’ancienne gare où les quais, abris et matériels ferroviaires ont été soigneusement préservés en témoignage du passé.
Il en est de même à Buxy où la gare est transformée en une halte cyclable face à la cave coopérative, comme une invitation à une petite dégustation !!! Givry, l’heure de la pause déjeuner a sonné. Nos anciens retrouvent leurs moitiés qui avaient pour mission d’acheminer les camping-cars jusqu’au lieu de rendez-vous. Cet après-midi, ils alterneront pour que les hommes puissent se reposer des efforts du matin pendant que les femmes s’adonneront aux joies de la randonnée. Pour nous, en tandem, c’est matin et après-midi. Quand on aime, on ne compte pas !
Depuis Saint-Boil, la voie verte flirte avec les vignobles de la fameuse « côte chalonnaise », qui compte parmi les grands vignobles bourguignons. L’entrée sur Chalon-sur-Saône marque la fin de l’itinéraire cyclable et le retour vers la civilisation. La traversée de la capitale économique du département, du sud au nord, se fait sans trop de difficultés mais à vitesse réduite. Très vite nous récupérons la voie verte longeant le canal du Centre qui nous conduit jusqu’à Chagny où nous passons notre première nuit sous la tente. Ainsi s’achève notre première étape qui aura été des plus plaisantes.
Lundi 21 juillet : CHAGNY -> DIJON (79 Km)
Cette étape sera de toute évidence la plus exigeante de notre périple. A la platitude des voies vertes et des canaux se succèdent côtes et descentes qui sillonnent, au cœur des vignobles aux noms évocateurs, Chassagne-Montrachet, Puligny-Montrachet, Meursault, Volnay, Pommard. Le parfum des terres ocres et les effluves des raisins dorés nous accompagnent tout au long de cette matinée. Les châteaux prestigieux où naissent et sont élevés les grands crus qui font la fierté de cette région posent majestueusement au milieu de ces paysages vallonnés.
Les viticulteurs s’affairent dans les rangs pour apporter les derniers soins à la vigne avant des vendanges qui s’annoncent précoces pour cette année particulièrement ensoleillée.
La véloroute « La Voie des Vignes » s’achève à Beaune. La porte des Avaux marque notre entrée dans LA capitale des vins de Bourgogne. L’itinéraire serpente au gré des rues pavées, dans le cœur historique de la ville cerclée d’une enceinte fortifiée comme le sont les fûts des tonneaux. La cité intra-muros regorge de trésors architecturaux, comme la basilique Notre-Dame et l’hôtel-Dieu, plus connu sous l’appellation des Hospices de Beaune, épicentre touristique de la ville, repérable de loin avec sa flamboyante toiture de tuiles vernissées, qui fut le théâtre de scènes cultes du film la « Grande Vadrouille » avec Bourvil et Louis de Funès.
Les efforts de la matinée ont creusé nos estomacs qui crient famine. La pause déjeuner à Savigny-lès-Beaune est la bienvenue, car le programme de l’après-midi nous réserve encore de belles surprises.
Nous n’en avons pas fini avec les vignes et les grimpettes à répétition qui rythment notre lente progression, sous une chaleur accablante. Aloxe-Corton, Nuits-Saint-Georges, Vosne-Romanée, Clos Vougeot, Gevrey-Chambertin, que de noms évocateurs pour l’épicurien que je suis. Les Pressoirs des Ducs de Bourgogne, à l’entrée de Chenove, marquent la fin de cette longue traversée viticole. Le canal de Bourgogne que nous avons maintenant rejoint nous conduit jusqu’au lac Kir, vaste plan d’eau au nord-ouest de Dijon où s’achève notre seconde étape.
Mardi 22/07 : DIJON -> SEURRE (67 Km)
Nous commençons la journée par une visite à vélo du cœur historique de Dijon, en suivant le « parcours de la chouette » matérialisé au sol par une signalétique en bronze, représentant le volatile symbolique de la ville. Ce circuit sillonne à travers les rues de la vieille ville où trône le majestueux Palais des Ducs, monument emblématique de la cité bourguignonne.
A la sortie de la ville, nous retrouvons la piste cyclable qui longe le canal de Bourgogne. Tantôt asphaltée, tantôt chemin de halage à l’état brut, c’est une alternance de parties roulantes et de tronçons chaotiques qui se succèdent sur une trentaine de kilomètres de cette voie rectiligne, dont seule la pause déjeuner viendra rompre la monotonie. Avant de franchir la Saône, nous nous offrons un petit détour le long du charmant port de plaisance de Saint-Jean-de-Losne.
La Saône enjambée, c’est une voie verte que nous empruntons maintenant. Elle longe pour partie le fleuve, s’en éloignant par moment, jusqu’à Seurre, où nous passerons notre troisième nuit. Celle-ci ne sera pas de tout repos. Le camping que nous avions réservé avant notre départ est investi illégalement depuis deux jours par une colonie de gens du voyage en provenance d’Irlande. Nous installons notre campement avec beaucoup d’appréhension sur l’emplacement que l’on nous indique, situé seulement à quelques mètres des envahisseurs. La nuit venue, nos craintes se confirment. Des chuchotements et des bruits suspects aux abords de notre toile de tente perturbent notre sommeil à plusieurs reprises. L’angoisse de voir disparaître nos beaux destriers nous maintient éveillés jusqu’au petit matin que nous accueillons avec soulagement. Fatigués mais pas mécontents de quitter les lieux !
Mercredi 23/07 : SEURRE -> TOURNUS (84 Km)
Comparée aux étapes précédentes, celle-ci est de loin la moins passionnante au niveau touristique. La voie verte qui s’est achevée hier à Chamblanc, petit village situé à quelques encablures de Seurre, a laissé place aux départementales que nous devons partager avec les autres usagers. Pour mes compagnons de route et cyclistes occasionnels, cette perspective est moins confortable et plus stressante. Le paysage est également empreint d’une certaine monotonie. Sous une chaleur écrasante, les champs de tournesols et de maïs remplacent les rangs de vignes dorées des premières étapes. Pour éviter la déshydratation et nous ravitailler en eau, la chasse aux cimetières et aux campings est ouverte. Les kilomètres défilent lentement et la lassitude s’installe dans le groupe. La pause déjeuner à Sassenay arrive à point nommé.
La reprise se fait à faible allure tellement la chaleur est devenue étouffante. Très vite, nous sommes en approche de Chalon-sur Saône que nous allons devoir traverser pour la seconde fois depuis le début de notre périple. Nous investissons la ville par le quartier des Prés-Saint-Jean, une zone très urbanisée. La piste cyclable est enclavée entre des voies très circulantes et une succession de barres d’immeubles et centres commerciaux qui nous invitent à la plus grande prudence. Après quelques ronds-points et traversées de grands axes, c’est avec plaisir que nous retrouvons la Saône. Nous suivons le fleuve pour sortir de la ville et rejoindre l’itinéraire partagé, ponctué de petits villages, qui nous conduit jusqu’à Tournus.
Jeudi 24/07 : TOURNUS -> CLUNY (64 Km)
Notre séjour itinérant touche à sa fin. Nous abordons cette dernière étape avec enthousiasme après une bonne nuit qui nous aura permis de récupérer des évènements de la veille. Un détour s’impose pour traverser le cœur historique de Tournus avant de rejoindre la « voie bleue » le long des quais de Saône.
Les deux tours de l’abbaye Saint-Philibert pointent majestueusement vers un ciel d’un bleu lumineux présageant encore d’une belle journée.
Le revêtement de la piste récemment asphaltée est de grande qualité et le vent, notre allié, nous porte. Nous filons à vive allure en profitant de la relative fraîcheur et caressés par les rayons d’un soleil encore timide en ce début de matinée. C’est à la « Vieille Ferme » à Sancé que nous avons prévu de déjeuner. Nous ne serons pas en retard pour festoyer grâce à la grande bonté d’Eole. Nous prenons le temps d’apprécier la cuisine locale dont nous n’aurons jamais été déçus tout au long de notre périple. Les agapes terminées, c’est sous un soleil piquant que nous poursuivons notre chemin.Les pointes des clochers de l’église Saint-Pierre se dessinent à l’horizon, Mâcon n’est plus très loin. C’est par les quais que nous pénétrons dans la ville où nous croisons la route d’un sympathique équipage, une jeune femme et son âne, en itinérance vers Saint-Jacques de Compostelle.
Nous quittons les quais de Saône peu avant d’arriver au port, afin de contourner la ville et rejoindre la voie verte direction Cluny. C’est avec émerveillement que nous retrouvons les vignes, celles du Mâconnais et les odeurs caractéristiques des terres viticoles. Au loin les Roches de Solutré et de Vergisson veillent sur les précieux cépages. Cette piste cyclable qui longe la Route du Soleil est la toute première voie verte, celle même que nous avons empruntée pour rejoindre Chalon-sur-Saône lors de la première étape. Vient le moment que nous attendons tous depuis longtemps, la traversée de la colline de Bois Clair au niveau du village de Berzé-le-Châtel, en empruntant le plus long tunnel cyclable d’Europe. Lors de la réhabilitation de cet ancien tunnel ferroviaire, des aménagements spécifiques ont été prévus pour garantir la quiétude des chauves-souris qui peuplent les lieux, depuis l’arrêt de l’exploitation de la ligne. Pour préserver l’hibernation de ces petits mammifères, le tunnel est fermé en période hivernale.
Les derniers kilomètres avant Cluny sont particulièrement exigeants, à commencer par l’ascension à la sortie du tunnel. La pente est rude et il faut se dresser sur les pédales pour hisser notre tandem jusqu’au sommet. Par la suite succède une série de montées et de descentes épousant le profil vallonné du clunysois. L’ancienne gare de Cluny, réaménagée en accueil cyclable marque la fin de notre périple.
Vivement l’été prochain et le retour des beaux jours pour se lancer dans une nouvelle aventure familiale.
Texte et photos : Philippe MARIANI
Pour plus d’infos :
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