FFVélo BCCF : Cyclomontagnarde Luchon Bayonne 23 et 24 juin 2018
Les exploits montagnards d’Hubert Serai suite
L’an passé, dans le numéro 144 de nos Carnets, Hubert nous avait raconté ses randonnées en montagne.
Il s’est à nouveau lancé sur des pentes difficiles, vertigineuses des Pyrénées en solitaire pour commencer, puis avec deux copains du club (Bernard Avenel et Gilles Deharbe) sur les routes vosgiennes.
Se lancer sur la randonnée Luchon-Bayonne, c’est accomplir la plus longue et la plus difficile des cyclomontagnardes de la FFVélo (325 kilomètres, 5 250 mètres de dénivelée dont 4 300 sur les 130 premiers kilomètres avec les montées successives du Peyresourde, de l’Aspin, du Tourmalet et de l’Aubisque). C’est aussi refaire une étape historique du Tour de France, cette étape dantesque du 21 juillet 1910 qui restera dans les mémoires comme la plus difficile jamais courue. Cette épreuve d’anthologie a inspiré le livre « l’étape assassine » de Robert Roy et de nombreux sujets sur Internet. C’est aussi faire en grande partie la 19ème étape du Tour de France 2018.
Vendredi
Bayonne : la matinée est consacrée au retrait des documents et plaque de cadre et à la logistique pour rejoindre le soir le lieu de départ, Bagnères de Luchon, situé à 300 km. Concernant le transport (bagages, cyclistes et vélos) vers Bagnères de Luchon, le club organisateur (Aviron Bayonnais) a mis les grands moyens : semi-remorque pour transporter les vélos, une dizaine d’autocars pour transporter cyclos et bagages. 13h00, nous emballons les vélos dans une housse ou du carton pour les entasser dans le semi-remorque. 13h30, embarquement des cyclos et bagages dans les bus numérotés, avec appel des participants. 14h00, les bus s’élancent sur l’autoroute pour arriver vers 17h30 à Luchon. Dans le bus, les conversations vont bon train. Il y a les cyclos hyper aguerris qui comptent faire la rando en moins de 15 heures pour se préparer aux 1 200 kilomètres de la Ronde Aliénor d’Aquitaine. Il y a les jeunes randonneurs espagnols qui viennent faire un chrono. Arrivés à Luchon, je récupère vélo et bagages pour rejoindre l’hôtel. Celui-ci est à 90% occupé par des cyclos où tout est fait pour bien nous accueillir (vélos dans garage, petit déjeuner dès 5h00 le matin, option pasta pour le dîner et les encouragements du personnel). Il est vrai que Luchon et le vélo, c’est une longue histoire puisque cette ville a accueilli (2018 inclus) 59 fois le Tour de France. Durant le dîner, nous sommes tous concentrés et préoccupés car quelle que soit l’option choisie (1 jours, 2 jours), il faudra se faire les 4 grands cols et les 4 300m de dénivelée correspondants dans la journée de samedi. La bonne nouvelle est que la météo sera bonne sur tout le week-end.
Samedi (200 km 4 300m)
Il est 5h00, Luchon s’éveille, les petits- déjeuners sont avalés, les cyclos sont habillés, les mécaniques sont réglées, au départ tout est prêt. Sur la place du casino, dès 6h30, les premiers cyclos hyper motivés (randonneur 1 jour) sont partis pour en en découdre avec les 360 km et 5 250 m de dénivelée. 7h00 au milieu du peloton, j’entame les premiers coups de pédales sur seulement 1 km de plat car tout de suite la pente du col de Peyresourde se profile avec 13 kilomètres pour monter à 1 569 mètres. La montée se fait assez lentement car je ne tiens pas à taper dans les réserves, la route est bonne et les pourcentages sont raisonnables. Cette portion est touristique avec la chapelle et l’église romane de Saint-Avantin, puis la traversée des villages pittoresques. Le final se fait dans une route à lacets assez impressionnants avec un pourcentage moyen de 8%. La vue bucolique sur les alpages et la station de Peyragudes nous font oublier le pourcentage. Une petite photo souvenir devant le panneau du col et c’est la descente rapide sur un véritable billard, pour rejoindre la vallée du Louron et laisser sur la gauche le col d’Azet Val Louron.
A la sortie d’Arreau, le col d’Aspin se montre déjà, avec ses 13 kilomètres à grimper jusqu’à 1 489 m. Les 4 premiers kilomètres ont une pente moyenne de 3,5%. Je ne me laisse pas griser par l’apparente facilité, car je sais que c’est un col avec une pente progressive. Les 5 kilomètres suivants montrent une déclivité de 6,5%. La dernière partie reste la plus raide, avec pour les 4 derniers kilomètres un bon 8% de moyenne. Au sommet, au milieu des vaches en liberté qui pâturent, nous attend le premier ravito de l’organisation. Celui-ci est particulièrement copieux car il faut récupérer des deux cols déjà grimpés, et faire le plein pour le gros col suivant qui nous attend. Je profite du ciel bleu et de la vue dégagée pour contempler le décor somptueux. Le pic du Midi de Bigorre encore couvert de neige se dresse devant nous et laisse entrevoir que l’hiver a été neigeux. Nous avalons la longue descente vers Sainte-Marie de Campan en contemplant les magnifiques décors du lac de Payolle et la carrière de marbre de l’Espiadet.
Arrivés à Sainte-Marie de Campan, il ne faut pas rater le virage à gauche pour attaquer le plat de résistance : le col du Tourmalet. Le bar de la place du village est envahi de cyclos qui font le « plein » avant de gravir les 17 kilomètres du col, car le soleil de 11 heures commence à chauffer.
L’appréhension commence à me gagner car ce col classé hors catégorie est le troisième de la journée et qu’il y a encore un autre derrière. Les 4 premiers kilomètres jusqu’à Gripp se font bien sur une pente d’approche d’environ 4%. Les trois kilomètres suivants jusqu’au camping d’Artigues se font sur une belle rampe à 8% qui sert d’échauffement à la partie la plus difficile qui est à venir. Pour nous remonter le moral, un panneau au niveau du camping nous informe que nous sommes à 10 kilomètres du sommet et qu’il y a encore 900 mètres à monter, soit une pente moyenne de 9% sur 10 kilomètres. Il y a peu de cols en France qui ont ce fort pourcentage sur une si longue distance (Mont du Chat, Grand Colombier, Ventoux, …). A la sortie de la partie boisée, monotone, seulement agrémentée par le lacet du Garet, les paysages grandioses se dévoilent en même temps que les pourcentages les plus forts. Nous entamons la fameuse portion de route avec les pare avalanches, avant la station de la Mongie et ses pourcentages à deux chiffres qui contrastent avec ma vitesse instantanée à 1 chiffre. Après la station, la difficulté des quatre derniers kilomètres (altitude et pourcentage) est compensée par la magnifique vue sur le massif de Néouvielle encore bien enneigé. L’arrivée au sommet est toujours un grand moment de bonheur qui efface, (du moins mentalement) les difficultés de la longue montée. Après la classique séquence photo, je suis le peloton assoiffé à l’intérieur du bar restaurant. La décoration du bar avec des photos historiques, le parking spécialement aménagé pour les vélos, la statue d’Octave Lapize (premier coureur du Tour à franchir le col en 1910) et le buste de Jacques Goddet (ancien directeur d Tour de France) vous rappellent que le vélo ici est une véritable institution. Les chiffres parlent d’eux mêmes : chaque année c’est environ 40 000 cyclos qui montent au sommet ;le col a été franchi par le Tour de France 79 fois (record tous massifs confondus) avec des années où il a été franchi 2 fois (1974, 2010).
Je me décide à remonter en selle pour le meilleur moment de la journée : la longue descente de 20 kilomètres jusqu’à Luz Saint-Sauveur, puis encore 20 kilomètres de faux plat descendant jusqu’à Argelès Gazost. Sur la place centrale, les terrasses de bar sont pleines de cyclos s’hydratant pour gravir les 1 000 mètres de dénivelée du Col du Soulor (1 474m). A la sortie de la ville, dans les premiers lacets, les jambes sont lourdes, le cou est raide. Ces désagréments nous rappellent que le Tourmalet a fait son œuvre d’entame des organismes. La chaleur du milieu d’après-midi n’arrange rien. Pour beaucoup la montée se fait au pas, à son rythme. Les 5 premiers km montent à 7% sur route bien bitumée. Puis vient une accalmie sur une route presque plate jusqu’au village d’Arrens (870 m). A la sortie d’Arrens, les affaires sérieuses reprennent puisque les 8 derniers kilomètres se font sur une pente moyenne de 8%. La fatigue commence à se faire sentir, les derniers lacets se font tout à gauche, des cyclos abandonnent et finissent dans le fourgon d’assistance. Je comprends mieux pourquoi il y en avait beaucoup. Les derniers hectomètres se font à l’arraché pour arriver enfin au col du Soulor où se situe le dernier ravito qui promet d’être festif avec les spécialités locales dont la fameuse ventrèche (tranches fines issues du ventre de porc). Il ne faut se priver car le reste est en descente.
Après ce moment de convivialité, nous redescendons vers la vallée du Gave d’Ossau pour rejoindre l’hébergement, par un itinéraire détourné, rallongé de 30 km car le final vers l’Aubisque est fermé, suite à éboulement sur la route de l’autre coté du col. La soirée au gite de vacances est vraiment un grand moment de gastronomie et de convivialité.
Dimanche (160 km 1 100m)
Après les 4 cols de la veille, cette journée peut paraître une formalité, mais il en est rien. Si le début se fait sur un faut plat descendant, il reste le modeste col d’Osquich (5 km à 6%) qui vous rappelle les kilomètres de la veille. La partie entre Saint-Jean -Pied de Port et Bayonne est une route à toboggans, assez cassants.
La beauté du pays basque et l’enthousiasme des supporters locaux nous donnent le moral. Les derniers kilomètres le long de l’Adour paraissent longs, mais seront vite oubliés après avoir goûté les verres de l’amitié à l’arrivée.
Pour faire cette rando, il faut une bonne préparation, mais les sacrifices valent vraiment l’enjeu. J’ai pu apprécier les moments de camaraderie et de soutien,même avec les cyclos espagnols et aussi le bon accueil de la population locale. Les bonnes conditions météo nous ont fait découvrir les paysages multicolores de la région allant du vert de la végétation, au blanc des sommets enneigées jusqu’au turquoise des lacs d’altitude. En conclusion une excellente randonnée pour celles et ceux qui ont les jambes et le moral.
Lien photos
Lien étape Pyrénées Tour 1910
Les chiffres : 1196 inscrits, 962 finisseurs dont 500 en un jour.
Texte / Photos et Vidéo: Hubert SERAI
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