Mon premier Paris Brest Paris
Après avoir pratiqué le VTT pendant de nombreuses années en me contentant de la sortie hebdomadaire, j’ai eu envie de me lancer dans des épreuves de longue distance. A travers cet article, je souhaite modestement vous raconter cette transition, qui m’a permis de réaliser le Paris-Brest-Paris 2023, afin de partager, avec ceux qui auraient des envies similaires, mon expérience et les enseignements que j’en ai tiré. J’espère que ce récit vous incitera à franchir le pas.
Du VTT à la route
Ma première expérience de la longue distance s’est faite en 2017 sur une épreuve d’endurance à VTT : Les 24h VTT de Cergy.
Le principe est simple. Il y a un circuit de 8 km et il faut faire le plus de tours possible en 24h. C’est une très bonne entrée en matière pour ceux qui, comme moi, veulent se lancer mais sont effrayés à l’idée de ne pas pouvoir rentrer. Cela permet d’expérimenter l’effort d’endurance sans pour autant s’aventurer à des centaines de kilomètres.
Lors de ma préparation, je comprends très vite que le travail en endurance passe par la route. A VTT, la difficulté des terrains parfois boueux impose plus d’heures de selle pour parcourir un nombre de kilomètres moindre. Et puis il faut ajouter les temps d’entretien du vélo qui est mis à rude épreuve. Donc pour parcourir des longues distances, acquérir du foncier, sans consommer trop de temps, le vélo de route est bien plus efficace.
Je suis arrivé bien préparé, mais malheureusement, le jour de l’épreuve, une tendinite au genou m’a obligé à abandonner au bout de 12 heures et 200 km parcourus.
Ce pépin physique est apparu à cause d’un mauvais réglage de ma position sur le vélo. Alors, mon premier conseil à tout ceux qui souhaitent se lancer dans la longue distance, c’est de commencer par faire une étude posturale. Certes, c’est un peu onéreux, mais c’est un bon investissement qui vous évitera des blessures. Car votre corps encaissera sans problème un réglage approximatif sur une sortie de 4 heures. Au pire, vous ressentirez une douleur qui passera le lendemain. Mais si vous passez plus de 10 heures sur le vélo (et même 80 heures pour mon PBP), votre corps ne le supportera pas.
C’est après avoir payé mon manque d’expérience que je choisi d’adapter ma pratique et de passer au vélo de route. Les épreuves longue distance y sont plus courantes et les pratiquants expérimentés plus nombreux.
C’est donc avec cette ambition que j’adhère au CTM, où je vais rencontrer mes désormais amis, Philippe et Christophe, qui vont me laisser embarquer dans leurs aventures vers Brest.
La préparation du Paris-Brest-Paris
La préparation du Paris-Brest-Paris passe par des épreuves qualificatives : les BRMs. Il s’agit d’épreuves homologuées au cours desquelles il faut parcourir une distance donnée dans un délai donné. Il nous faut donc valider en 2023 :
– Un BRM 200 : 200 km à parcourir en moins de 13h30,
– Un BRM 300 : 300 km à parcourir en moins de 20h,
– Un BRM 400 : 400 km à parcourir en moins de 27h,
– Un BRM 600 : 600 km à parcourir en moins de 40h.
Ces BRMs sont l’occasion de se préparer physiquement et mentalement, mais aussi de tester son matériel (vêtements, sacoches, éclairages, GPS, …).
Notre préparation est basée sur deux principes fondamentaux : régularité et progressivité. Elle commence en Janvier et Février avec des sorties hebdomadaires d’environ 100 km dans des conditions hivernales (les températures avoisinent parfois les 0 °C).
En Mars, nous augmentons la distance et cumulons quatre 200 km, dont 2 BRMs. C’est une excellente distance pour travailler le foncier car elle se parcoure en une journée de vélo, même une courte journée d’hiver, et il suffit d’emporter un sandwich en guise de ravitaillement.
C’est l’occasion de se confronter aux conditions venteuses et pluvieuses que la météo saisonnière nous impose. Si les premiers 200 m’ont soumis aux lactiques et aux crampes, au bout du 4ème, je sens que j’ai franchi un cap. Si bien qu’en Avril, le BRM 300 s’est avéré être une formalité.
Le BRM 400 se déroule au mois de Mai et là, nous entrons dans une autre dimension. L’épreuve doit être abordée d’une toute autre manière car sa durée impose de rouler de nuit, ce qui nécessite un équipement plus important : des vêtements chauds, un gilet jaune et des éclairages. Il faut également gérer l’autonomie de ses équipements. Pour ma part, j’avais des batteries de rechange pour mon éclairage avant, une deuxième lampe pour l’éclairage arrière et une Power Bank pour la recharge de mon GPS. J’ai malgré tout connu quelques déboires avec mon GPS. Une trace de 400 km, c’est trop pour ses capacités mémoires. D’où l’intérêt de bien connaître les limites de son matériel.
L’épreuve est très difficile avec ses 4000 mètres de dénivelé positif. Et puis il faut trouver de quoi se restaurer et remplir les bidons en cours de route (le sandwich en poche ne suffit plus). L’épreuve se déroulant principalement de nuit et loin des grandes agglomérations, nous ne trouvons pas grand-chose et je dois me contenter du (trop) peu que j’ai emporté. Je termine épuisé, à la limite de la fringale.
En Juin, Nous abordons le BRM 600 de la même manière que le 400. Il est une nouvelle fois exigeant avec ses 6000 mètres de dénivelé positif, mais cette fois, fort de mon expérience, j’ai prévu beaucoup plus de nourriture et je termine dans un état tout à fait correct. Comme quoi, le travail et l’expérience, ça paye.
Une fois tous les BRMs validés, il ne faut pas perdre le rythme pendant les 2 mois et demi qui nous séparent encore du Paris-Brest-Paris. Aussi, les mois de Juillet et Août sont pour ma part agrémentés de randonnées à la journée, plus ludiques, jusqu’en baie de Somme, jusqu’en Touraine et dans les ballons Vosgiens.
Paris-Brest-Paris
J’ai choisi de faire cette épreuve sans assistance, et je pense que c’était un bon choix. Contrairement aux BRMs, il est facile de se ravitailler puisque chaque point de contrôle, tous les 90 km environ, vous propose un espace de restauration. De plus, il y a beaucoup de gens sur le bord des routes qui vous propose de l’eau, du café et des biscuits. Pas de problème pour le couchage non plus, il y a des dortoirs, même si je n’en ai pas profité (j’aurais peut-être dû). Cette épreuve bénéficie vraiment d’une organisation impeccable. Tout est conçu pour que vous ne pensiez qu’à votre effort sur le vélo.
La plupart des départs ont lieu le dimanche soir. Moi, je suis parti dans les derniers, le lundi matin, à 5h30. J’ai donc moins profité des festivités, mais en contrepartie, j’ai eu la chance de traverser les Monts d’Arrée de jour et de voir la mer à mon arrivée à Brest. D’ailleurs, le parcours fait la part belle au patrimoine breton : la citadelle de Fougères, l’enclos paroissial de Sizun, celui de Pleyben… On en prend plein les yeux.
Au niveau physique, j’ai tout connu. L’euphorie du départ, les moments de doute, les regains de confiance, le besoin de sommeil… Les premiers signes de fatigue sont arrivés très tôt, au bout de 250 km. J’ai très vite été dans la gestion. Mais au final, tout s’est bien passé. J’ai toujours réussi à récupérer et je n’ai eu aucun pépin physique. Tout juste quelques douleurs sous les pieds et un peu d’engourdissement dans les mains. Par contre, les fesses… Il m’a fallu 2 semaines après l’épreuve avant de pouvoir me rasseoir sur une selle !
Le plus compliqué a été la gestion du sommeil. J’avais besoin de dormir, mais je ne pouvais pas m’arrêter trop longtemps sous peine d’être hors délai au point de contrôle suivant. Du coup, la performance s’en ressent, et au bout de la 3ème nuit, je n’étais plus très lucide. Il était temps que je termine.
Pour le reste, c’est une aventure humaine dans laquelle on n’est jamais vraiment seul. Il y a la complicité des autres participants, la ferveur et la bienveillance des gens sur le bord des routes, les farandoles de lumières rouges la nuit, l’entraide pour rentrer dans les délais. On se sent parfois si petit par rapport à l’immensité de l’épreuve, et parfois si grand dans les yeux de ceux qui vous applaudissent, dans les yeux des enfants qui vous tapent dans la main.
C’est une épreuve très dur, c’est vrai. Je me suis souvent demandé ce que j’étais venu faire dans cette galère, et puis, dès la ligne d’arrivée franchie, je ne pensais qu’à y retourner. Le plaisir n’est pas dans l’instant, il est dans l’accomplissement.
Pour conclure, si vous en avez envie, lancez-vous. C’est une aventure humaine exceptionnelle à vivre. Certes, c’est une épreuve difficile, car rien n’est jamais facile dans la vie, mais elle reste accessible pour peu qu’on s’en donne les moyens. Après ça, vous ne vivrez plus le vélo de la même manière. Les villes vous sembleront plus proches. La France vous semblera plus petite. Et plus rien ne vous semblera impossible.