Visitez le site www.ctmaurepas.fr

22 janvier 2019

Philippe MARIANI – Mes Paris – Brest – Paris

image_pdf

Nous restons dans la grande actualité de l’année 2019, je parle de celle de Paris Brest Paris et c’est Philipe Mariani qui, cette fois, a bien voulu partager son expérience ;
Philippe est membre du club depuis 1997 mais cyclo depuis de très nombreuses années, depuis tout petit me dit-il  puisque son premier vélo date de ses 10 ans. De cette passion du vélo, il en a fait depuis peu son métier. Expérience un peu différente de celle d’Alain, racontée précédemment, comme vous le lirez, mais expérience à partager.

Philippe, quand as-tu réalisé pour la première fois cette randonnée ?

En 1999, je participais pour la première fois.

La première édition a été pour toi une belle découverte puisque depuis tu es régulier dans ta participation ?
Depuis j’ai réalisé celles de 2003, 2007, 2011 et 2015.

Quel temps consacres-tu à l’entraînement ?
En moyenne 1h5 à 2 heures de pédalage par jour, soit environ entre 500 et 700 heures de vélo sur l’année.

Comment répartis tu tous ces kilomètres sur la semaine ?
Pour la préparation du prochain PBP, mes séances d’entraînement seront quotidiennes, tantôt sur le vélo en extérieur, tantôt sur le vélo d’appartement lorsque le temps me fera défaut (je suis toujours en activité !!!) où que les conditions climatiques ne s’y prêteront pas.

Quel type d’entraînement pratiques-tu ?
Pendant mes séances d’entraînement en extérieur, je privilégie des sorties longues à un rythme soutenu et régulier, reproduisant celui que j’adopterai durant l’épreuve. Celles et ceux qui me connaissent, savent que je n’apprécie pas beaucoup les changements de cadence, le fractionné n’est donc pas trop ma « tasse de thé », même si cette pratique peut s’avérer très bénéfique pour optimiser les performances.
Lors de mes entraînements, je préfère être seul ou accompagné par des pratiquants partageant la même conception du vélo. En début de saison je couvre une centaine de km par sortie, soit environ 3h50 de pédalage à une vitesse moyenne variant entre 25 et 27 km/h selon les profils du parcours et les caprices de la météo. Lorsque je sors avec le club le mercredi et le dimanche, j’abandonne souvent mes compagnons en cours de route pour rallonger la séance de quelques kilomètres et respecter le programme que je me suis fixé. Il est très rare que j’annule ou reporte une séance, la rigueur et la persévérance comptent également parmi les clés de la réussite sur PBP.
Le retour du printemps et le rallongement des jours me permettent d’augmenter le kilométrage pour s’approcher des distances à couvrir lors des brevets qualificatifs pour PBP, distances qui varient entre 200 et 600 km.

Et ton vélo ?
Mon vélo est une randonneuse légère en carbone conçue à mes mesures. Le constructeur se nomme CYFAC et l’usine est située à La Fuye près de Tours. Je suis fidèle à cette marque depuis 1998. Mon premier vélo était en aluminium dessiné par Armel André, le célèbre ergonome qui oeuvra durant de longues années pour le compte de nombreuses équipes cyclistes professionnelles. Avec plus de 200 000 kilomètres au compteur, cette monture porte aujourd’hui les couleurs de « FOURCHETTE & MANIVELLE » et je l’utilise pour faire la promotion de ma société et accompagner mes clients en balade.

J’imagine qu’ayant réalisé plusieurs fois cette épreuve, ton temps passé sur le vélo est différent :
Sur 5 participations, j’ai franchi la ligne d’arrivée à 4 reprises. Malheureusement en 2011, un problème physique survenu quelques jours avant le départ m’a contraint à l’abandon à Brest.
Il m’aura fallu entre 60h16 et 75h05 pour couvrir les 1200 km du PBP. J’ai réalisé le meilleur temps en 2003 en compagnie de mon ami Didier LE DEVEDEC aujourd’hui licencié au club des Essarts-le-Roi. L’édition durant laquelle je suis resté le plus longtemps en selle fût la dernière en 2015. J’accompagnais cette année-là mon beau- frère pour sa première participation à l’âge de 65 ans, ce qui devrait ouvrir des perspectives à toutes celles et ceux qui pensent être trop âgés pour s’aligner au départ de cette magnifique épreuve.
Petit clin d’œil de Philippe qui souligne qu’avec un bon entraînement, tout est possible !!

Nous savons que les participants ne partent pas tous à la même heure et que l’heure du départ dépend du temps que chacun estime réaliser ; quel horaire choisis-tu ?
En 1999, pour mon coup d’essai, j’ai opté, par prudence, pour un délai de 90 heures me garantissant une marge de sécurité confortable.
Pour les éditions suivantes et mieux armé avec quelques années de pratique, j’ai choisi la formule 80 heures.
J’avoue que l’option intermédiaire de 84 heures me tente bien, dans la mesure où le départ a lieu au petit matin le lundi soit le lendemain des grandes vagues des 80 et 90. Cette formule présente l’avantage pour les cyclos suffisamment rapides de s’épargner une nuit sur le vélo.
Dans tous les cas, l’euphorie des participants et les encouragements du public au bord de la route rendent les départs toujours très toniques. Il faut redoubler de vigilance pour éviter les chutes si l’on souhaite rester au cœur du peloton ou bien laisser partir la chenille pour rouler à son rythme.

Tu randonnes seul ou avec assistance ?
1999 fût mon premier coup d’essai sur PBP. Novice, j’ai pris le départ avec un groupe de cyclotouristes chevronnés. Parmi ces adeptes de la longue distance, nous retrouvions Serge Fougeray, Nicole Endres, Jimmy Gouband, pour ne citer que celle et ceux encore adhérents aujourd’hui au CTM. J’ai beaucoup appris à leur contact car ils n’étaient pas avares de bons conseils pour déjouer les pièges inhérents à la pratique de la longue distance.
De 2003 à 2015, le PBP a toujours été une aventure partagée en famille avec mon épouse, mes parents et beaux-parents.

Quel matériel emportes-tu ?  :
Le matériel à emporter dépend bien sûr du choix de réaliser cette épreuve seul ou avec assistance.
Moi qui ai choisi de partager cette aventure avec ma famille, mon vélo est peu chargé : des démonte-pneus, une pompe, deux trois chambres à air, un pneu plié, un multi-outil comprenant une clef à rayon et un dérive-chaîne et deux rayons. Ma famille en camping-car se charge de porter nourriture et vêtements.

A propos de nourriture, comment t’alimentes-tu tout au long du trajet ?
L’alimentation est déterminante. Un cyclotouriste en action consomme environ 400 calories par heures. Sur une épreuve de longue distance, le rythme des repas est bouleversé. Le cycliste grignote en permanence pour satisfaire ses besoins énergétiques. Cela a pour conséquence une sécrétion constante de sucs digestifs pouvant être la cause de perturbations gastriques chez certains sujets dont je fais partie.
– Avec l’expérience, j’ai adopté certaines règles pour limiter ces effetJe choisis une boisson isotonique au PH neutre que je sous-dose
– Je privilégie une alimentation liquide riche en apports caloriques et rapidement digérée.
– Je bannis les barres énergétiques et autres gels inutiles lorsque l’allure est maîtrisée, les viennoiseries riches en beurre.
– Pâtes, pommes de terre avec un filet d’huile d’olive et une pincée de sel pour maintenir le niveau de sucres lents, d’acides gras, essentiels, et retarder l’apparition des crampes.

Quel type de vêtements emportes-tu ?
Pour 80h, j’emporte deux cuissards, deux maillots, des socquettes et des vêtements chauds pour affronter la fraîcheur des nuits bretonnes. Les températures peuvent encore atteindre les 30° en journée fin août et descendre à 5° la nuit avec en prime le brouillard notamment lors de la traversée des Monts d’Arrée.
A chaque contrôle, lorsque le participant bénéficie d’une assistance, il est important d’anticiper les conditions de roulage des 4 prochaines heures (nuit, pluie, froid …) pour adapter sa tenue en conséquence. Pour les autres, le problème ne se pose pas sauf si la sélection des vêtements a été mal pensée à Paris !!!
Pour illustrer mes propos, je me souviens avoir été momifié avec du papier journal par les agents de la Croix Rouge en 2003, édition durant laquelle Didier et moi avions souffert de la fraîcheur matinale lors de la traversée des plaines du Perche. Cet épisode nous a valu plus d’une heure d’arrêt au dernier contrôle à Nogent-le-Roi pour nous réchauffer avant de reprendre la route.

On comprend bien que la nuit peut être difficile à cause du froid, mais malgré cela est-ce que tu as plaisir à rouler la nuit ou est-ce que tu appréhendes ce moment ?
J’affectionne particulièrement rouler de nuit ; les sensations sont différentes, la route se dévoile à nous au gré de notre progression et les difficultés sont avalées avec moins d’appréhension que si nous les découvrons longtemps à l’avance. Seul le sifflement des roues dans le vent vient perturber le silence du peloton.
Rouler de nuit impose un éclairage performant pour anticiper les ornières et les imperfections de la chaussée. Mon vélo est équipé d’un phare SON Edelux fixé sur un support dans le prolongement de la potence et alimenté par le moyeu dynamo de la roue avant. A l’arrière ma visibilité est assurée par deux feux rouges puissants fonctionnant à piles. Le gilet jaune fluo vient compléter la panoplie indispensable à notre sécurité. Je veille toujours à emporter dans mes sacoches des piles de rechange et une lampe frontale bien utile en cas de crevaison nocturne.
Même si la nuit les températures sont plus basses qu’en journée, il ne faut pas, pour autant, négliger de s’hydrater régulièrement pour alimenter les muscles et éviter les défaillances et crampes. Pour ma part je prends la route avec deux bidons de 75 cl dans lesquels j’alterne eau et boisson isotonique.

A quelle allure roules-tu ?
Bien que classée comme randonnée, PBP n’en est pas moins une course contre le chronomètre puisque chaque participant, en fonction de la formule choisie, dispose d’un nombre d’heures limite pour couvrir l’épreuve. Il est donc très important de ne pas perdre de temps. Sur le vélo, je fais toujours le choix d’une allure soutenue et régulière en préservant mon capital énergie dans la durée. Ce sont les sensations qui dictent ma cadence. J’évite, tant que faire se peut, les sur régimes qui sont fréquents lorsqu’on infiltre des groupes dont le rythme est trop rapide. Lors des arrêts aux contrôles, je pointe mon carnet de route et repars de suite pour rejoindre mon véhicule assistance positionné à l’écart du tumulte quelques kilomètres plus loin, pour des pauses courtes variant entre ¼ d’heure et ½ heure. Lorsque le sommeil me gagne, je n’hésite pas m’accorder quelques heures de sommeil dans le camping-car familial.
Il faut également avoir conscience que la durée du retour sera, dans la majorité des cas, supérieure à celle de l’aller, à cause de la fatigue.

En roulant ainsi à ton rythme, comment arrives-tu à l’arrivée? dans quelle condition physique es-tu ?
Il ne faut pas se mentir, PBP est une épreuve exigeante d’où les participants ressortent fatigués, après 1200 km, et nous le serions à moins. Pour autant, dans la majorité des cas, quelques bonnes nuits de sommeil suffiront à régénérer les organismes éprouvés. Quelques désagréments peuvent parfois nous accompagner plus longtemps, à savoir un engourdissement à l’extrémité des doigts, dû à la position des mains sur le guidon, ou encore des inflammations superficielles au niveau des chevilles, des genoux, du cou et du séant, induites par la durée de l’épreuve. Exceptée l’édition de 2011 qui a vu mon abandon à Brest, je suis à chaque fois revenu dans un état acceptable et surtout avec l’envie de repartir 4 ans plus tard.

Est-ce que tu es revenu avec parfois des regrets concernant ta préparation ou un autre aspect ?
Mes nombreuses participations m’ont permis d’enrichir mon expérience et de conforter ma passion pour la randonnée au long cours. Je n’ai manifesté aucun regret au terme de mes 5 participations, y compris lorsque j’ai dû abandonner en 2011. Les échecs font partie du sport. Ils mettent l’accent sur nos points faibles et nous obligent à parfaire notre préparation pour revenir plus fort les fois suivantes. Pour ma part, mon attention doit se porter sur la gestion de l’alimentation pendant l’effort.
Tous les vélos peuvent convenir pour ce type d’épreuve. Mon CYFAC carbone me donne entière satisfaction ; un bon compromis entre rendement et confort. Je l’ai récemment équipé de roues spéciales et j’ai rajouté un amortisseur en gel sous la guidoline pour atténuer les vibrations de la route afin de retarder l’apparition des tensions dans les poignets et le cou.

En 2019, tu repars ?
C’est mon ambition et mon souhait le plus cher ! Je me réjouis déjà à l’idée de retrouver la communauté des cyclotouristes venus du monde entier pour vivre cette belle aventure humaine. Mais ne nous enflammons pas trop vite. Le précieux sésame indispensable pour l’ouverture des portes de l’inscription ne sera obtenu qu’après validation des brevets, principal objectif de ce début de saison.

Il y a un âge à ton avis pour ce type de longue randonnée ?
Non, je ne pense pas. Une bonne condition physique et entraînement adapté suffisent ; Alexandrine Lamouller-Henry, fille de l’ancien président de la FF Vélo l’a réalisé en 1995 pour ses 20 ans. Mon beau-frère s’est lancé pour la première fois à 65 ans et il a croisé des cyclos bien plus âgés que lui !!!

Il faut s’entraîner beaucoup, cela prend du temps et n’est pas toujours facile pour la famille
Chez les Mariani, nous avons fait du PBP une aventure familiale. Je considère que les proches jouent un rôle fondamental avant, pendant et après l’épreuve. Réaliser les brevets qualificatifs est chronophage et les entraînements engendrent des absences régulières ; c’est le prix à payer pour participer à cette belle aventure.

Après avoir participé plusieurs fois, que penses-tu de l’organisation ?
L’arrivée de la dernière édition ne m’a pas trop enthousiasmé ; la traversée de nuit de la base de loisirs de St Quentin, puis l’entrée dans un vélodrome vide et silencieux nous ont tous beaucoup déçus. Celles et ceux qui avaient connu les précédentes éditions ont certainement regretté le manque d’ambiance.
J’espère que les organisateurs y remédieront lors de la prochaine
Philippe s’entraîne régulièrement déjà, en plein hiver, à l’extérieur ou chez lui ; souhaitons- lui de réussir les brevets !
Entretien de Danielle CORS avec Philippe MARIANI
Photos Maindru 

Aller à la barre d’outils